10 janvier 1396.
 
  
La chasse individuelle n'est pas une "conquête" de la Révolution.
Durant le haut Moyen Âge la chasse était ouverte à tous les hommes libres tant nobles que roturiers.
Dès le VII ième siècle, toutefois, certains s'ingénièrent à limiter le droit de chasse des non nobles, le recul a été lent et non synchrone selon les régions. Un poème de 1080, "du nom des outils" cite encore les lacet les filets dans les instruments des paysans. Gaston Phébus, à la veille du XV ème siècle ne méconnaissait pas les Preuve s'il en est que.
Louis XI la taxera, puis l'infâme François Ier la réservera aux nobles.
Pourquoi chasser ? Pour détruire les nuisibles qui ravagent récolte et troupeaux : loups, ours, sangliers ; les présentes lettres sont bien forcées de le reconnaître. Afin de se nourrir : gros gibier des forêts closes pour les nobles, petits animaux pris au piège pour les vilains. Pour exercer les jeunes nobles à la guerre : interdire la chasse aux paysans, c'est aussi leur ôter les armes et les compétences indispensables en temps de révolte. Par plaisir, ou pour respecter les commandements divins, puisque la pratique de la chasse éloigne de l'oisiveté comme le prétend Gaston Phébus... "Donc bon veneur sera sauvé et en ce monde aura assez de joie, liesse et plaisir."

A tous ceux qui ces lettres verront, Jean, seigneur de Foneville, chevallier, conseiller du Roy nostre sire, garde de la prévosté de Paris,
Salut. Savoir faisons que Nous, l'an de grâce mil trois cens quatre vingtz et seize, le mercredy sept jour de febvrier, vismes unes lettres du Roy nostre sire, seellée en double queue de son grand sell contenant cette forme:
  Charles, par la grâce de Dieu Roy de France, à tous ceux qui ces 
  lettres verront Salut. Il est venu à Nostre connoissance par le rapport 
  de plusieurs personnes dignes de foy, tant de nostre conseil comme autres, que 
  plusieurs personnes non nobles, laboreurs et autres, sans qu'ils soient a ce 
  privilégiez, ne qu'ils ayent adveu de personnes nobles ou autres, ayans 
  garennes ou privilèges, ont et tiennent devers eux chiens, fuiront, cordes, 
  lacs, filletz et autres engins à prendre grosses bestes rouges et noires, 
  conils, lièvres, perdrix, faisans et autres bestes et soyseaux d'ou la 
  chasse ne leur appartient, ne doit appartenir, par quoy, il est advenu et advient, 
  chacun jour, que lesdits non nobles en faisant ce que dit est, délaissent 
  à faire leurs laborages ou marchandises et commettent plusieurs larrecins 
  de grosses bestes et de conils, de perdrix et de faisans, et d'autres bestes 
  et oyseaux, tant en nos garennes commeen celles des nobles et autres, nos sujetz, 
  dont il est advenu mault de fois que quand Nous et les nobles de nostredit Royaume 
  avons voulu aller en dedans, l'on a trouvé en plusieurs lieux, peu ou 
  néant de bestes et oyseaux, et par ce le déduit de Nous et desdits 
  nobles a esté et est souvente fois empesché, par quoy, si remède 
  n'y estoit mis, plusieurs dissentions, débats et destours se pourroient 
  survenir et mouvoir entre nos subjetz nobles et non nobles, et s'en ensuivroient 
  plusieurs autres inconvéniantz, mesmement que lesdits non nobles, en 
  persévérant en ce, sont souvent emprisonnez et pour ce traitz 
  à grandz amendes, et per les oyseaux qu'ilz y eurent en ce faisant deviennent 
  larrons, meurtriers, espieurs de chemins, et mènent mauvaise vie, dont 
  par ce est advenu et advient souvent, qu'ils ont finé et finent leurs 
  vie par mort dure et honteuse, qui est en grande confusion de nostre peuple 
  et détriment de la chose publique de nostre Royaume, et au grand dommage 
  de Nous et de nos subjetz; pour quoy Nous voulons à ce estre remédié. 
  

  Sçavoir, faisons que eue sur ce grand et meure délibération 
  de nostre grand conseil ou estoient nos très chers et très amez 
  oncles et frères, les ducs de Bourgonhe, d'Orléans et de Bourbon, 
  et plusieurs autres notables personnes de nostredit conseil, avons ordonné 
  et ordonnons, par ces présentes, que dores en avant aucunes personnes 
  non nobles de nostre Royaume, s'il n'est à ce privilégié 
  ou de ce il n'a adveu ou expresse commission à ce de personne qui sa 
  luy puisse ou doive donner, ou s'il n'est personne d'églize à 
  qui toutes fois, par raison de lignage ou autrement deuement ce doivent compéter, 
  ou s'il n'est bourgeois vivant de ses possessions et rentes, ne se en hardisse 
  de chasser, ne tendre à grosses bestes ou menues, ne oyseaux, en garenne 
  ne dehors, ne de avoir et tenir pour ce faire chiens, fuirons, cordes, lacz, 
  filetz et autres arnois, et au cas que aucuns desdits non nobles autres que 
  ceux dessus déclarez sera trouvée ayant en sa maison chiens, fuirons, 
  cordes, lacz, filetz et autres engins ou tendent aux bestes et oyseaux dessus 
  devisez, Nous voulons et mandons que le noble ou la justice sobz qui il sera 
  demeurant ou soubz qui il chassera, les luy puisse oster de fait sans aucune 
  répréhension, toutes fois au temps que les pocz et autres bestes 
  sauvages vont aux champs pour manger les bledz, il Nous plaict bien que les 
  laboreurs puissent tenir chiens pour garder leursdits bledz et chasser les bestes 
  d'iceux, sans que pour ce ilz doivent perdre iceux chiens, ne payer amendes, 
  mais si en ce faisant, ilz prenoient aucune beste, ils seront tenus la porter 
  au seigneur ou à la justice à qui il appartiendra, ou si ce non 
  ilz restabliront ladicte beste et payeront l'amende, si donnons et mandons et 
  commettons si mestier est à nostre amé et féal cousin et 
  conseiller Guillem, viscomte de Melun, souverain maistre et général 
  refformateur des eaux et forestz par tout nostredit Royaume, et à tous 
  autres maistres requesteurs de nos eaux et forestz dessusdits, ou à leurs 
  lieutenans, et à chacun d'eulx, si comme à luy appartiendra que 
  nostredite ordonnance fassent publier solemnellement par tous lieux notables 
  où ilz verront qu'il sera expédient et icelle tenir et garder 
  sans enfraindre en aucune manière, et s'ilz treuvent aucuns faisans le 
  contraire ou contredisant à ce, ilz contraignent à la tenir par 
  amende et toutes voyes et manières deues et raisonnables, ainsi comme 
  ils verront que de raison sera à faire, en tesmoins de ce Nous avons 
  fait mettre à ces lettres nostre seel. 
  Donné à Paris le Xe jour de Janvier, l'an de grâce mil CCC 
  IIIIxx et seize, et le XVIIe de nostre règne. Ainsi signé par 
  le Roy en son conseil. J. de Sanctis. 
  Au dos desquelles lettres estoit escript ce qui ensuit: "publicatae fuerunt 
  praesentes litterae in camera palatii et ad fenestram die quinta februarii. 
  Anno domini millesimo trecentesimo nonagesimo sexto", J. Billequin, publié 
  en jugement et ez auditoires du Chastelet de Paris le mardi sixiesme jour de 
  febvrier, l'an mil trois cens quatre vingtz et seize, Fresies; et nous à 
  ce présant transcript, avons mis le seel de la prévosté 
  de Paris l'an et le jour dessusditz. A. Lemunier. Collation est faicte.

Tandis que les valets déjeunent sur une simple nappe, les guides déposent sur la table de Gaston Phebus les fumées, c'est à dire les crottes du gibier dont ils ont suivi la trace.
Gaston de Foix, 1331- 1391. Soit à cause de sa chevelure blonde, soit par orgueil, il adopte le surnom de "Phebus", nom du dieu grec du soleil. . Guerrier réputé, il accompagna les chevaliers teutoniques dans leur croisade contre les païens de Pologne et des pays baltes. Louvoyant entre Angleterre et France, il est de fait, sinon de droit quasi souverain du Béarn.
Mécène fastueux, auteur d'un livre d'oraison rédigé en repentir du meurtre de son fils (qui avait peut être projeté de l'éliminer).
Auteur d'un extraordinaire "Livre de chasse", parfois inspiré par le livre du Roi Modus et de la Reine Ratio, le plus souvent reprenant les expériences personnelles du chasseur. L'ouvrage recense toutes les techniques du temps, à l'exception notable de la fauconnerie, y compris des techniques s'apparentant au braconnage.

Un valet pratique l'éviscération d'un sanglier. Un autre assainit les tripes dans un feu autour duquel se regroupent quelques chasseurs frigorifiés. Deux valets préparent un mélange de sang et de pain pour confectionner la soupe de tripes destinée à la meute.
© grande-boucherie.chez.tiscali.fr